Chapitre 1

Les Zorx sont un peuple pacifique, portés sur la philosophie et les discussions.

L'essentiel de leur activité consiste à développer des "aptitudes" afin d'enrichir leurs discussions.

La plupart du temps, ces aptitudes sont mentales ou intellectuelles, mais parfois il s'agit d'aptitudes physiques.

Ils ont une apparence physique très variable du fait de leur capacité à la modifier à leur convenance, lors du développement de certaines "aptitudes"

Toutefois ces processus de métamorphose sont lents et nécessitent pas mal d'énergie, ce qui fait qu'ils préfèrent y réfléchir avec soin avant d'entreprendre une transformation.

Leur planète, Zora, étant plutôt tranquille et accueillante, ils ont pu évoluer pendant des millénaires, adaptant leur propres organismes aux ressources disponibles, ces "ressources" étant en majorité des organismes microscopiques qui foisonnent aussi bien dans les océans que sur l'épais tapis de bactéries qui recouvre le sol.

Ces micro organismes se chargeant de convertir par photosynthèse l'énergie de rayonnement de l'étoile autour de laquelle Zora orbite.

D'autres micro organismes ayant colonisé le sous-sol et les océans utilisent les diverses substances chimiques disponibles sur cette planète, et constituent des ressources importantes pour les Zorx.



Chapitre 2

Les Zorx sont les seuls organismes complexes sur Zora. Les paramètres de Zora étant stables, et les Zorx capables de mutations et d'adaptations multiples et variées, ils ont emprunté une voie évolutive faite de coopération, de communication très intense entre individus, et au terme d'une longue évolution, leur complexité est devenue remarquable.

Ils ont également établi des symbioses avec les micro organismes extérieurs, ce qui dans certaines situations peut les conduire à être eux-mêmes producteurs d'énergie et partiellement ou totalement autonomes vis à vis des ressources de leur environnement.

Leur mode de reproduction, qui consiste en une division d'un individu en deux ou trois descendants, et une fusion de deux à trois individus en un seul, les a conduits à avoir une population relativement stable, et lorsque leurs évolution intellectuelle a été suffisante, ils ont pris en main leur destin collectif en recherchant le meilleur équilibre entre les ressources disponibles et leur population.

En résumé, les Zorx sont perpétuellement installés dans un confort de vie total, les accidents de vie étant quasi inexistants, et mis à part quelques évènements astronomiques comme des rarissimes chutes de météorites, ou des erreurs de mutations, heureusement réversibles pour la plupart.

En fait, ils passent leur temps à capitaliser du savoir.



Chapitre 3

Il est difficile de décrire l'univers mental des Zorx avec des mots humains, et aussi de décrire de manière résumée leur apparence physique tant elle est variable.

Pour tenter de résumer, disons que lorsqu'un Zorx s'est trop spécialisé dans certaines "aptitudes", il lui devient nécessaire de se diviser suite à une perte d'efficacité, et à l'occasion de cette division, chacun de ses descendants hérite de la plupart des "aptitudes" du parent. Ils choisiront ensuite de s'unir avec un autre Zorx dont les aptitudes sont compatibles, et dont l'organisme offre suffisamment de disponibilité pour héberger les connaissances et aptitudes de son conjoint. La forme physique du résultat de cette fusion est souvent assez disparate, en attendant que le nouvel individu se reconfigure d'abord en quelque chose de pratique sur le plan physique, avant d'explorer une nouvelle forme correspondant à ses projets. A titre d'exemple, nous allons nous intéresser à un personnage récemment fusionné, que nous appellerons Zor240 pour plus de commodité. J'ai omis de vous préciser qu'il est peut-être plus facile de caractériser un Zorx par son activité principale plutôt que par un nom ou une forme physique...



Chapitre 4

Zor240 est le descendant d'un mathématicien, d'un laboratoire de physique et d'un réacteur de biosynthèse.

Son premier parent correspond assez facilement à l'idée que l'on peut se faire d'un protoplasme extra-terrestre. Il était du type peu mobile, avec d'importantes aptitudes mathématiques développées dans son cerveau hypertrophié.

Son deuxième parent, sédentaire jusqu'à sa division était constitué de structures bioniques métalliques d'assez grande taille et coopérait activement avec des Zorx produisant de l'électricité, des lasers, et divers faisceaux de particules nécessaires pour mener des expériences de physique fondamentale La partie dont Zor240 a hérité constitue une sous-structure spécialisée dans l'étude du vide quantique, qui s'était installée sur une zone de la planète ou les sources d'énergie étaient abondantes, et à proximité de leur troisième parent, qui lui n'était pas mobile du tout.

Ce dernier est essentiellement un réservoir de grande capacité, bardé de capteurs, régulateurs et autres unités auxiliaires, semi-enterré, qui espérait pouvoir se reconvertir en une sorte de chambre à bulles, dans un délai raisonnable.

L'assemblage hétéroclite qui en résultait ne ressemblait plus du tout à l'idée que l'on peut se faire d'un protoplasme extra-terrestre.

La reconfiguration de la forme que Zor240 entreprit, constituait un projet ambitieux, même du point de vue du jugement des Zorx.

Il dut renoncer à bien des méthodes classiques, qui auraient pris beaucoup trop de temps, dut recourir à l'aide d'autres Zorx, et il dut même solliciter du conseil principal (qui est une forme de réunion de gouvernement) quelques dérogations liées à la quantité de ressources dont il aurait besoin, et à l'emprise au sol qui dépassait la plupart de ce que les Zorx réalisaient habituellement, si l'on fait abstraction des Zorx spécialisés dans l'extraction minière et de quelques autres "aptitudes" nécessitant spécifiquement des surfaces importantes.



Chapitre 5

Après bien des métamorphoses de chacune des trois parties qui le constituaient, il finit par acquérir les "aptitudes" qui lui permettraient de pousser bien plus loin que tout ce que les Zorx avaient connu, la recherche sur la structure intime de l'univers.

Lors des discussions collectives , y compris lors des séances du conseil principal, le sujet avait captivé une bonne partie des Zorx scientifiques, et bon nombre de de Zorx spécialisés dans les disciplines voisines avaient décidé de se joindre au projet, soit en se connectant sur Zor240 (sans aucune connotation sexuelle) soit par le biais de connexions sur le mode habituel, c'est à dire tout bêtement par le biais des ondes radio que la plupart des Zorx pratiquaient.

Une "aptitude" cruciale qui faisait défaut à Zor240 était la possibilité d'analyser les frontières de l'infiniment petit, c'est à dire lorsqu'on approche des dimensions d'un proton et de ses composants internes. Cette partie de la physique quantique n'était abordée que par quelques Zorx quelque peu étrangers à la communauté de pensée majoritaire, car il leur avait fallu développer des "aptitudes" étranges et quelque peu effrayantes, liées à la mise en oeuvre de processus quantiques au coeur même de leurs circuits intellectuels. Cette extrême spécialisation était considérée comme assez dangereuse en ce qu'elle rendait difficile la division et la fusion qui sont nécessaires à l'élimination des processus entropiques de dégradation de la composition des Zorx. Or ces aptitudes quantiques interféraient avec cette réduction d'entropie qui est elle même apparemment de nature quantique. Précisons en passant, cela reste la question non résolue par les Zorx malgré des millénaires de recherche.



Chaptre 6

Alors que ses aptitudes étaient au mieux de ce qu'il pouvait espérer, Zor240 dut attendre particulièrement longtemps l'évènement qu'il pensait pouvoir observer puis analyser : il s'agissait d'une fluctuation spontanée du vide quantique menant à l'apparition d'une paire particule antiparticule particulièrement massives.

Donc, les Zorx aux "aptitudes quantiques" se joignirent au projet afin d'accéder aux éléments d'information de cette nature qui ne manqueraient pas de surgir lors de l'évènement, pour essayer ensuite d'en apporter une traduction ou une représentation qui soit intelligible aux Zorx non quantiques.

L'évènement se produisit enfin un jour, dans des circonstances tout à fait favorables, et une quantité considérable d'informations déferla sur la quasi totalité des Zorx de la planète, du moins sur ceux qui étaient connectés ou concernés par le sujet, que ce soit à titre philosophique, physique, quantique, politique ou toute autre discipline qui pouvait être en lien avec cet évènement.



Chapitre 7

Boris, Andrew et quelques autres furent finalement surpris de l'avancée des travaux de Zor240.

Bon, on doit dire que Boris et Andrew ne sont pas leurs vrais noms, car ces deux-là, et leurs congénères, n'étaient pas du genre de ceux à qui on donne un prénom. Mais il faut bien relater cette histoire d'une façon un peu ordonnée, et c'est le moyen qu'on a trouvé pour le faire. En fait, Boris et Andrew sont superviseurs centraux.

Cela faisait des millions d'années donc que Boris et Andrew surveillaient les Zorx. Ils les avaient découverts sous forme d'éponges sous marines, puis de sortes de méduses en masse de cytoplasme, l'évolution suivant un chemin atypique sur Zora.

Ces Zorx ne faisaient rien comme les autres formes d'intelligence apparues ça et là dans l'univers. Alors que la plupart se développaient sur un mode concurrentiel, puis avec des technologies et des machines, les Zorx avaient réussi à se dispenser de machines, en étant eux-mêmes devenus des systèmes bioniques, mi-vivants mi machines, dirigeant leur propre évolution depuis des millénaires.

Et ces diables de Zorx semblaient maintenant capables de démonter les rouages de l'Univers, chose que Boris et Andrew eux-mêmes n'avaient même pas eu l'idée de faire. Il allait falloir s'y intéresser de manière assez urgente.



Chapitre 8

L'information déferla. Boris et Andrew n'avaient pas anticipé que le tsunami les atteindrait de plein fouet. Ils n'avaient pas pris la précaution de réduire le canal d'observation des Zorx, et le flot des informations traversa le centre de gestion, recouvrit la plupart des unités de gestion, et partit dans un désordre total en débordant sur les autres canaux.

Fébrilement, Boris ajusta les réglages de son secteur, et réussit à minimiser l'impact de l'évènement sur les civilisations sous sa responsabilité. Certaines en pâtiraient certainement, car des "découvertes" prématurées de certaines lois de l'univers conduisaient facilement certaines civilisations à s’autodétruire.

De rares civilisations en tireraient un bénéfice, au moins temporaire, si le hasard des informations qu'elles reçurent coïncidaient avec leur état d'avancement.

Mais globalement, cela resta dans une mesure raisonnable, et Boris put se féliciter de la qualité de sa réaction, et alla voir ce qui se passait du côté d'Andrew.

Andrew réussissait moins bien. Comme les Zorx faisaient partie des sociétés dont il avait la surveillance, les canaux de surveillance les plus proches furent aussitôt saturés, et leur régulation fut temporairement impossible. Même Boris ne put l'aider pour certains flux, qui partirent dans diverses directions avec une sorte d'autonomie, ou de volonté propre.

Chapitre 9

Je suis sur une chaise longue, sur la terrasse en bois du chalet ; il est 20h et le soleil de cette fin d'été est couché depuis un moment.

C'est l'heure propice au calme et à la rêverie. Une fourmi qui marche sur l'accoudoir va monter sur mon bras, et je suis immobile. Je l'observe, et j'essaie d'imaginer ce que je représente pour elle, et ce qu'elle représente pour moi. Deux échelles différentes de taille. Deux perceptions du temps. Deux gammes de perceptions différentes, l'une surtout chimique, l'autre surtout visuelle. Deux mondes proches, et éloignés : la fourmi, moi. Je construis ma perception du monde par une représentation mentale qui inclut la fourmi. Elle est dedans , et aussi dehors. Puis la rêverie s'installe. Je vois, dans l'espace vide de ma rêverie, un évènement spontané. Du vide surgissent soudain deux mondes. Je les perçois sous une forme impossible à qualifier, et pourtant impossible à ignorer. Ils fuient lorsque j'essaie de focaliser mon attention sur les détails, mais ils redeviennent plus sensibles quand je relâche mon attention et reprend une vision plus large. Je n'arrive pas à les séparer de cette façon, il faut que je réussisse à les penser comme étant un seul élément , peut être emboîtés l'un dans l'autre. Je perds la notion de ces deux mondes brûlants au profit d'une sorte de décor qui m'entoure : je suis dans l'une des deux particules, et la deuxième est enchâssée dans un trou minuscule au centre de mon espace mental. Je n'arrive pas à les distinguer, et ça provoque une sorte de vertige. C'est la même particule, dont je vois la surface en regardant vers le milieu de moi, et dont je vois la paroi intérieure en regardant autour de moi. Celle qui est au centre, j'ai l'impression qu'elle n'existe pas encore, elle est si petite que c'est comme si elle devait arriver de très loin, d'un point encore plus lointain au fond du centre. Et celle qui m'entoure semble émettre un message ancien. Elle est vieille. C'est la même particule qui n'existe pas encore, au centre, et qui autour de moi se disloque dans sa vieillesse comme un papier trop vieux. Ce qui est en haut est comme ce qui est en bas.

Au moment ou l'enveloppe trop vieille se dissout et disparaît, la particule au centre explose, puisque c'est une seule et même chose. L'onde de choc, sphérique, me repousse comme une vague pousse un surfeur. Je glisse sur la vague de temps. Je peux me déplacer librement sur cette surface en expansion, en glissant sur le temps. La vague acquiert des propriétés étranges; elle qui semblait éthérée au début devient plus dense, gazeuse, puis noirâtre comme une eau la nuit. Il n'est plus possible de traverser la surface de cette eau pour le surfeur que je suis. Elle est noire et piquetée de points brillants. Puis la vague s'étale progressivement, je n'ai soudain plus de surf et je tombe entre les points brillants. Je tombe. Et je finis brusquement de tomber. Je suis au milieu de l'univers. Pas au centre, juste au milieu, entre l'espace lointain des galaxies disparues, et les atomes de l'accoudoir de ma chaise longue. Je sors un peu groggy de ma rêverie avec un nom bizarre qui sonne dans ma tête ... Andrew est inquiet. Qui est Andrew ?


Chapitre 10

Wang Li s'était assoupi dans son labo. Il s'éveilla en sursaut , stressé à la fois par le rêve qu'il venait de faire et par la crainte d'avoir été surpris à dormir alors qu'il était censé rédiger son compte-rendu. Il en reprit la rédaction, avec des battements de coeur un peu trop présents dans sa poitrine pendant quelques minutes. Puis le calme revenu, il commença à se demander si ce qu'il était en train d'écrire avait un quelconque intérêt. Cette voie de recherche qu'ils avaient explorée était clairement sans issue. Il entra dans une méditation étonnante, où il examina son propre travail avec une froide distance, travail dans lequel les expériences les plus intéressantes qu'il venait d'entrevoir en rêve n'avaient pas été envisagées. Il pensa d'abord développer dans son rapport les hypothèses qu'il venait d'imaginer, quand il se rendit compte brutalement que ses supérieurs ne pourraient évidemment pas les accepter. Il se contenta donc de terminer délibérément ce compte-rendu idiot le plus vite possible pour explorer ses nouvelles idées au plus tôt, car il serait alors libéré de ce stage de fin de cycle et allait devenir titulaire sous peu.

Wang Li s'était attiré une considérable notoriété auprès des plus hautes autorités, teintée à la fois de respect et de jalousie. Sa première année de titulaire avait fait l'effet d'une bombe dans l'institut ; il avait développé des théories hardies et innovantes, assorties de projets d'expérimentation détaillés qui permettraient de valider d'incroyables perspectives. Le secret militaire s'était aussitôt abattu sur le laboratoire où il était devenu de facto le dirigeant du projet. Les représentants du parti étaient même venus lui décrire les enjeux et la responsabilité qui pesaient désormais sur lui.

Un telle source d'énergie, si ces hypothèses étaient avérées, pourraient être un saut technologique majeur dans le domaine des vecteurs militaires, bateaux, missiles, avions et même probablement vaisseaux spatiaux. Les moyens financiers et les contrôles de sécurité du laboratoire prirent une ampleur jamais vue.


Chapitre 11

Anton Karkov avait consacré sa vie à ses recherches, et cette passion l'avait quelque peu amené à négliger sa santé. Pour finir ses travaux avant d'être atteint par la limite d'âge, il avait de temps en temps recours à certains médicaments pas tout-à-fait inoffensifs ni légaux. Il se demanda s'il n'avait pas abusé de cette aide la veille au soir, car il avait subi une phase de confusion mentale qui l'avait laissé épuisé ; et il venait de dormir douze heure d'affilée. Mais le plus surprenant, c'est que le lendemain même, des idées bouillonnaient dans son cerveau. Il fila comme un flèche vers son laboratoire et entama le jour même un travail théorique complètement nouveau, délaissant ses précédentes recherches dans l'état où elles étaient. Il fit peu après une communication très remarquée à l'Académie, et le ministère de la défense le recruta aussitôt, avec un budget apparemment sans limite clairement fixée. Les meilleurs spécialistes des projets militaires en cours l'accueillirent comme un frère du jour au lendemain, et le projet qu'il ébaucha à son arrivée éclipsa en quelques semaines tous les autres développements en cours. Il ne s'agissait de rien de moins que d'aspirer l'énergie du vide quantique avec des configurations de machines qu'on pourrait probablement embarquer dans un camion, ou même un avion ...


Chapitre 12

Plusieurs physiciens et chercheurs de différentes nationalités aux États-Unis s'étonnèrent des coïncidences qui émaillaient les articles récemment publiés, et qui correspondaient curieusement à leurs propres recherches. Une communauté se constitua spontanément en quelques jours, puis après quelques messages échangés entre eux, il leur parut nécessaire de se réunir chez Johnson, qui était celui qui disposait à la fois de la notoriété, du laboratoire et de la compétence qui devraient être mobilisés pour explorer cette ouverture théorique. Lors de la réunion, il devint évident qu'il fallait contacter les autorités et entourer désormais leurs recherches de plus de confidentialité. La voie de développement de la nouvelle technologie parut clairement tracée dès cette première réunion, la seule chose qu'ils ne purent éclaircir fut de déterminer quelle lecture, quelle information parmi la masse de parutions disponibles avait pu déclencher les mêmes idées chez ces huit chercheurs.


Chapitre 13

Les relations internationales s'étaient brutalement dégradées. Les trois principales puissances militaires de la planète étaient devenues arrogantes, chacune semblant soudain devenue libre de toute crainte ou de toute inhibition. Puis une paranoïa s'installa dans les ministères des armées ; il leur semblait que des fuites d'informations se produisaient, car chacun estimait qu'il était pratiquement impossible qu'une telle innovation, si loin de tout ce qui se pratiquait jusqu'alors, puisse être développée par les autres pays sans recourir à l'espionnage. Des purges intervinrent dans les administrations, dans les états majors, dans les laboratoires ... Chacun était sur ses gardes, aussi bien pour sa propre carrière que pour une éventuelle trahison d'un collègue. La paranoïa, la suspicion, le doute, la crainte accompagnèrent dès lors les personnes travaillant sur ces projets.


Chapitre 14

Andrew était inquiet. Il réunit une commission, au cours de laquelle il fut décidé d'intervenir. Pour remettre un peu d'ordre sur cette planète agitée, les deux voies étaient envisagées : la réduction ou l'augmentation, chacune pouvant présenter des risques. Boris suggéra une troisième possibilité, qui consisterait en une augmentation temporaire d'un agent, ce qui conduirait à une réduction, d'apparence naturelle, moins susceptible d'effets indésirables. La proposition fut adoptée.


Chapitre 15

Devant l'escalade des tensions internationales, les mouvement pacifistes prirent une ampleur remarquable. Les services de surveillance, d'espionnage, de contre-espionnage déjà surchargés depuis plusieurs mois, ne purent faire face à toutes ces émergences de contestation et durent abandonner l'idée de pouvoir tout surveiller. Mais dans l'ombre, à l'écart de cette agitation, l'activité des hackers de plusieurs pays dits secondaires devint soudain plus insidieuse, plus discrète, plus perspicace ... Ils déterrèrent des secrets peu reluisants, découvrirent des vulnérabilités infimes mais cruciales dans de nombreux systèmes, à travers des réseaux reculés ou presque abandonnés. Puis un jour, cela se produisit : des centres financiers occultes furent piratés, les banques vacillèrent, la spéculation s'envola à des hauteurs stratosphériques, et dans ce contexte de sanctions réciproques des plus grands pays industriels, l'économie et le système financier finirent par s'arrêter. Et avec eux l'électricité, l'information, les transports, puis la production, les mines et industries primaires, l'extraction et l'acheminement des combustibles fossiles, puis les industries de transformation, et tout le reste ...


Chaptre 16

Anton Karkov, malgré son âge cultivait des patates et des navets non loin des ruines de la base navale de Marioupol. Avec un peu de troc, il survivait presque correctement, et pouvait passer quelques heures chaque jour à méditer au bord de la mer Noire et à se réchauffer au soleil du soir.

Parmi les physiciens qui avaient survécu aux émeutes de San Francisco, Johnson avait rejoint une communauté Amish, et travaillait le cuir.

Wang Li travaillait du matin au soir dans une rizière. Il avait choisi deux prénoms bizarres pour ses deux fils : Andrew et Boris. Son épouse avait catégoriquement refusé de prénommer le troisième "Zorx".


Chapitre 17

Dans la communauté Zorx, l'expérience de Zor240 avait créé un malaise, les dangers qu'ils avaient perçus lors de l'Evènement les avaient conduits à abandonner ce domaine de recherche. Zor240 s'était ensuite divisé, en reprenant des aptitudes plus conventionnelles. Le descendant de rang 3, Zor243 s'était spécialisé dans la synthèse biologique et avait mis au point un ingénieux assemblage de chaîne d'atomes en double hélice qui servait de modèle ou de patron à l'auto construction d'un complexe biologique, qui lui même se développait de manière relativement autonome sur le sol de Zora, du moins là où il y avait suffisamment d'eau. Cela prenait la forme d'un assemblage de cellules entourés d'une membrane, capables de photosynthèse, dont la hauteur totale atteignait trente centimètres de haut, et qui en fin d'évolution produisait un épi de graines riches d'une substance d'hydrates de carbone. Après une multiplication autonome, ces agrégats photosynthétiques pouvaient produire à leur tour les mêmes graines qui germaient et poussaient dans des champs recouverts d’une couche d’eau et servaient dorénavant de ressource alimentaire pour l'ensemble des Zorx.